Il portait sur son tatouage la marque de la honte : c'était un sigle rouge barrant les armoiries de ses maîtres, et qui apparaissait dès lors qu'un serviteur manquait gravement à son devoir, était banni par les siens ou – le pire de tout – trahissait un membre de sa maison.

Depuis que Sytry avait déchiré son maître du menton jusqu'au nombril – tuant sans motif apparent l'homme qui s'était pourtant piqué pour lui d'une affection paternelle – le serviteur rejouait la scène du méfait dans son sommeil, se débattait tout en pleurant et murmurait des insultes dans une langue étrangère ; au matin, il griffait les murs de sa prison jusqu'au sang – et, parfois, l'écho de sa voix parvenait jusqu'à l'antichambre des surveillants ; lesquels notaient dans un rapport l'unique mot que Sytry savait bien prononcer : « Maître... Maître ! »

« Sans doute des remords ? » Et ils reprenaient leur discussion.

Mais ils avaient tord – Sytry parlait à un autre maître que sa victime : l'homme – ou plutôt la voix – qui lui avait ordonné de détruire ses chaînes humaines. Un homme issu du même monde que Sytry avancerait immédiatement qu'il était impossible pour un serviteur de porter la main sur son chef, et que le tatouage sur leur épaule droite était la preuve de leur soumission aux lois de la société.

Il n'en était rien. Avant le meurtre, il ne se passait pas une semaine sans que la voix résonnât dans sa tête – une voix irrésistible ; ça n'était pas la parole d'un homme, mais d'un dieu ! et qu'importe s'il s'agissait d'un magicien usant de son autorité : quelques nuits blanches suffirent à lui soumettre Sytry.

« Maître ! Maître ! Parlez-moi ! Ne vous ai-je pas bien servi ? Maître ! » Puis il hurlait à s'en déchirer la gorge.

Alors même que le serviteur avait accompli la volonté de son maître-sans-nom et qu'il avait noyé le baron dans son sang, maints sabliers se vidèrent sans que les voix ne revinrent. « M'aurait-il abandonné ? Pitié... »

« Maître... Maître ! MAÎTRE ! OUI ! Parlez-moi ! OUI ! Que voulez-vous ? Vous avez besoin de moi... « ailleurs » ? Dites-moi tout ! je partirais là-bas ! j'accomplirai vos instructions ! »

Alors, les murs de sa prison blanchirent ; une lumière apparut d'une source invisible ; il sentit son poids quitter la surface du sol ; et son regard se posa sur les objets de son monde pour la dernière fois.

Dominateur – Quiconque aurait connu Sytry avant l'irruption des premières voix ne pourrait croire à l'actualité sanglante qui frappa ses maîtres tant il était d'un caractère doux et d'une loyauté durcie par l'épreuve. Ainsi, s'il a été victime depuis d'une idolâtrie étonnante, les restes de sa bonté nuancent ses décisions et l'amènent à traiter avec quiconque, tant que ses rencontres servent sa mission.

Nul ne sait par quel pouvoir le Maître parvint à amadouer autant de personnes. Dans son monde, un dossier des services secrets de l'Empereur veille à le repérer tant il sème l'angoisse parmi la population : soumettre des individus tout en restant anonyme lui permit d'asservir une petite armée, dont Sytry, qui trouve son plaisir dans le plaisir de son chef.

La servilité de son âme pousse Sytry à ne pas accorder de valeur à sa vie ; au moment de mourir, il n'aurait pas d'autre regret que de laisser son maître insatisfait. Paradoxalement, ses dons pour le relationnel lui permettent de s'allier aux personnalités les plus diverses et de trouver un intérêt commun avec les hommes les plus éloignés de sa cause.

Avez-vous besoin d'une réponse plus développée ? Le Maître ordonne : Sytry obéit ; sa personnalité obéit à cette sentence. Et même s'il ignore tout des objets qui lui ont été assignés au soir de sa disparition, la confiance que lui inspire son supérieur et la joie qu'il ressent d'avoir été sélectionné donnent à sa servilité la saveur de la joie.

Il aime résoudre les énigmes, tendre des pièges et les éviter ; toutes les activités militaires qui excitent une grande intelligence gagnent son adhésion. Quand au reste, le monde peut brûler ; la découverte d'une autre planète ne l'a même pas ravi : au contraire, maintenant qu'il y en a une deuxième, il se sent libre d'accomplir ici des méfaits, épargnant sa terre natale.

Déposition de l'ancien chef du personnel où travaillait Sytry : « […] Il obéissait au baron avec un tel bonheur d'être utile qu'il aurait donné sa vie pour la prospérité de ses maîtres. Ah ! Il n'y avait pas d'êtres plus malins que lui au château, comment donc pouvait-il être perturbé... ? même le professeur des enfants perdait de tout son éclat lorsque Sytry et lui se trouvaient dans la même pièce... »

Ne pensez pas que la servitude de Sytry a réduit en lui tout sens du commandement : sa seule force étant de s'appuyer sur des réseaux d'individus et d'agir à travers eux comme son Maître, il sait recruter, tenir et punir des partisans, ayant le don de repérer la volonté ou l'objectif secret d'un homme. Restez méfiants : ses alliances d'intérêt deviennent bien vite des étaux.

Sytry a des dons de Furie – il peut deviner les sentiments d'autrui, dissimuler les siens et bénéficier de bonus différents selon l'émotion qu'il ressent.